Dans la tête des décrocheurs scolaires (article du temps)

Ils ne trouvent pas leur place, alimentent parfois la rubrique des faits divers et risquent d’aboutir à l’aide sociale: les élèves qui perdent pied à l’école souffrent et mettent la société à l’épreuve. Plongée inédite dans le monde de Marine, Thibault, Aurèle et les autres.


Cette enquête a été réalisée par Laurie Willommet, lauréate de la Bourse Le Temps, enseignante (voir plus bas). Elle a mené près d'une vingtaine d'entretiens en profondeur avec des décrocheurs, des parents, et différents acteurs du monde de l'éducation vaudois. Vous découvrirez ci-dessous son récit, une interview de la spécialiste du décrochage Catherine Blaya, des chiffres et des liens utiles, ainsi que le «making of» de l'opération.


Thibault* a beau avoir 37 ans, les mauvais souvenirs d’école hantent encore aujourd’hui le Vaudois. «Je pense que mon échec scolaire remonte à mon premier exercice, en première année, se rappelle-t-il. Ça m’a marqué, le souvenir est tellement net. On nous expliquait des chiffres avec des barrettes de couleur. J’ai eu ce sentiment de grand stress, cette panique, cette honte face au fait que je ne comprenais pas la logique. C’était totalement incompréhensible pour moi, mais complètement logique et accessible pour la plupart des autres élèves. A partir de là, ça a été une lente agonie.»

Bilingue et intelligent, Thibault vivote aujourd’hui de petits boulots, en se consacrant à la peinture; il vient d’organiser son premier vernissage. Revivre son parcours scolaire suscite en lui un flot d’émotions difficile à arrêter.

Pêle-mêle, il évoque ce sentiment de s’être très vite senti différent et pas à sa place, la comparaison avec sa sœur qui elle était très scolaire, un cadre parental très strict, les redoublements, sa «connerie d’ado, la fierté de l’échec, de n’en avoir rien à foutre face à l’institution». Il raconte la Norvège où sa mère l’a envoyé une année pour essayer un autre rapport à l’école, le retour difficile, les squats, l’errance. Il raconte les larmes aux yeux la fois où, des années plus tard, on lui a proposé un cachet de Ritaline, la molécule censée lutter contre le déficit de l’attention: «J’ai eu l’impression pour la première fois de ma vie d’avoir accès à mon cerveau de manière objective.»

Le cas de Thibault est loin d’être isolé. Dans le canton de Vaud, ils sont environ 150 jeunes tous les ans à quitter l’enseignement obligatoire sans diplôme et sans projet de formation. A Genève, les décrocheurs se comptent par centaines. On les retrouve parfois traînant durant l’adolescence, en attendant d’avoir l’âge de toucher l’aide sociale.

Marine non plus ne s’est jamais sentie à sa place à l’école. D’abord victime de harcèlement, «sans que le professeur bouge le petit doigt», elle a plusieurs fois changé d’école, de voie, redoublé. Elle a signé des contrats l’engageant à bien se comporter, rompus pour une cigarette interdite mais irrésistible. Refus de l’autorité, révolte, influence délétère d’amis l’éloignant encore de l’école: «Peut-être que si j’avais fréquenté des gens qui aiment la connaissance au lieu d’aller fumer des joints, si on s’était vus pour réviser plutôt que pour fumer, oui, ça aurait pu tout changer.»

Après des années à traîner de formations en stages, Marine a repris goût aux études à l’école de couture, «le premier métier de ma vie où je n’ai pas l’impression que je vais au travail». Elle redouble sa première année, mais elle est convaincue que cette formation, pour la première fois, à 21 ans, elle l’achèvera.

Un problème de comportement, pas d’aptitudes

Enquêter sur les décrocheurs scolaires, c’est se frotter à des Thibault et des Marine tous différents, à des parents et des enseignants impuissants, résignés, et aussi inconscients et irresponsables, parfois.

Leurs besoins ne sont pas si particuliers que ça, mais l’école n’a pas su y répondre

Michael Altenhöfer, ancien doyen

Très souvent, c’est le comportement de ces élèves qui est en cause, non leurs dispositions cognitives. Les décrocheurs ont des problèmes psychosociaux, mais guère d’intelligence ou d’apprentissage.

«En dix ans, je n’ai reçu qu’un seul jeune qui avait des problèmes cognitifs», constate Marco Pavarini, le directeur de Gingko, une structure de travail social mise en place par la ville de Vevey pour accompagner les jeunes dans la rue et les aider à se prendre en main.

«Leurs besoins ne sont pas si particuliers que ça, mais l’école n’a pas su y répondre», complète Michael Altenhöfer, ancien doyen à l’école obligatoire et lui-même père de deux décrocheurs. «J’ai souvent dit en tant que doyen que l’école était une machine à broyer. C’est super quand vous rentrez dans le moule, mais d’autres sont plus rebelles, plus difficiles, et fonctionnent différemment. Là, on entre vite dans la confrontation, les enseignants ne changent pas de position et l’enfant réagit.»

La rigidité de l’institution, il l’a vécue de près, douloureusement, avec ses deux fils victimes de phobie scolaire. Qui n’ont jamais pu passer d’examens, puisqu’ils ne pouvaient pas aller à l’école.


Pour lire l'intégralité de l'article, c'est ici: https://www.letemps.ch/suisse/tete-decrocheurs-scolaires


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